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Into the woods, Granville gallery, Paris
Into the woods est né d’une rencontre entre la designer matali crasset, le cinéaste Benjamin Crotty et le céramiste Ehren Tool dans le cadre particulier du Vent des Forêts, centre d’art rural en Meuse, dirigé par Pascal Yonet.
Dans ce territoire champêtre marqué par la première guerre mondiale, ces trois artistes dialoguent : matali crasset parle ici d’un retour à la nature – on peut penser à Henry David Thoreau –, Benjamin Crotty évoque le côté domestique de l’armée autour d’une mise en éclats des stéréotypes sexuels, tandis qu’Ehren Tool, qui a été un acteur de la guerre, témoigne de sa reconstruction par sa pratique de la céramique.
Les paysages que matali crasset a connus enfant sont ceux de la Champagne pouilleuse et de la Marne qui ont été marquées à la fois par la première guerre mondiale et par la déforestation, avec un développement agricole soutenu par l’usage d’engrais et de pesticides, eux-mêmes issus des armes chimiques de la Grande Guerre...
matali crasset est engagée depuis 2009 dans une aventure avec Vent des Forêts. Pour ce centre d’art rural hors norme dont le white cube est une forêt, elle a conçu des refuges pour dormir dans les bois. Ce sont les trois Maisons sylvestres – le nichoir, la noisette et la chrysalide – qui ont été réalisées dans le cadre de la commande publique.
Avec ce nouveau projet, la designer présente une suite d’objets en bois, du petit mobilier, des quilts… C’est un ensemble de pièces en bois d’érable sycomore : des assiettes et des bols, réalisés en collaboration avec le tourneur Philippe Huet, des cuillères réalisées avec le sculpteur sur bois Jean Bergeron.
En écho à ces pièces de bois, matali a conçu deux quilts avec des carmélites et une capeline, réalisés avec une tisserande locale, Colette Chatelet.
Le Vent des Forêts a aussi accueilli le tournage du film du réalisateur américain Benjamin Crotty, tournage qui a recontextualisé les architectures de matali crasset dans un univers fictif.
Son film, Fort Buchanan, une tragicomédie qui se déroule dans l’univers militaire le temps des quatre saisons, s’est installé dans ses architectures. Ses maisons sylvestres servent d’habitations aux époux/épouses de militaires alors que son hôtel Dar Hi en Tunisie se transforme en camp militaire djiboutien...
Au-delà de l’architecture, les transpositions et les transformations dans ce film ont lieu à d’autres niveaux : esthétique, géographique, linguistique et sexuel.
Finalement, le film combine le conformisme linguistique de la série télé et la poésie visuelle associée au cinéma d’auteur.
Benjamin Crotty présentera une pièce basée sur des rushes réalisés sur la saison Printemps du film.
Ehren Tool est un ancien GI américain qui a participé à la guerre du Golfe et dont la vie est désormais centrée sur le travail de la céramique. Depuis 2001, il crée à un rythme quasi industriel des cups, et uniquement : c’est autour de cet objet banal et fortement ancré dans la culture américaine qu’il a déterminé sa pratique. Il invite à témoigner de la guerre en demandant au public de lui adresser des images de leurs proches en uniforme, la cup devient un objet de transmission et de mémoire pour diffuser un message de paix. Ehren Tool a produit et distribué depuis 2001 près de seize mille cups.
Ehren Tool est invité cet été pour une résidence au Vent des Forêts. Il présentera des pièces issues de ce workshop et d’autres réalisées en collaboration avec matali crasset et divers invités.
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Crédits
- Aurelien Mole, Loup Godé